
Association de cyclistes urbains de Montreuil (Seine
Saint Denis - France).
membre de la Fubicy
sur le même sujet, voir notre texte sur la réforme du Code
de la route
Les cyclistes doivent-ils respecter le Code de la route ?
- (Extrait d’un article d’Isabelle Lesens et Abel Guggenheim – Combat
Nature 116 – février 97)
Si le vélo apparaît « dangereux » ce qu’il
n’est globalement pas, c’est en vertu de fantasmes d’automobilistes et
de piétons qui remarquent avec une pointe de jalousie la liberté
de mouvement dont jouissent les cyclistes. Pourtant ceux-ci ne commettent
pas plus d’infraction que la moyenne des usagers. Il est par ailleurs intéressant
de détailler la nature de ces infractions.
Les cyclistes, à ce qu’on dit, ne respectent jamais les règles
de la circulation. Ils brûlent les feux rouges, remontent les sens
interdits, roulent sur les trottoirs…
Les automobilistes, quant à eux et chacun en convient, respectent
scrupuleusement les dispositions législatives et réglementaires
du code de la route.
Saintes et inoffensives autos…
En ville, aucune voiture ne roule à plus de 50km/h. Les interdictions
de stationner sont respectées (passages piétons, emplacements
de livraison, places réservées aux handicapés). Les
automobilistes ne stationnent pas au débouché des pistes
cyclables, comme tout un chacun peut le constater. Il en est de même
au droit des dénivelés permettant aux handicapés de
monter sur les trottoirs, et ceux-ci, nullement gênés dans
leurs déplacements, se félicitent chaque jour du civisme
des automobilistes.
Pendant le plan Vigipirate, comme tous les Français se pliant
aux consignes de sécurité, aucun automobiliste n’a, pour
garer sa voiture, déplacé une barrière placée
devant une école ou un établissement public, et on n’a donc
pas été contraint de les fixer au sol. Jamais les automobilistes
ne s’aventureraient sur un trottoir ou dans une zone piétonnière,
ni pour y circuler, ni pour y stationner, ce qui donne aux piétons
en général, aux parents avec poussette en particulier, un
confort de marche que bien des pays étrangers nous envient. Ce respect
scrupuleux a permis d’éviter de border les trottoirs de barrières,
ou de « quilles » disgracieuses, dont la présence serait
sinon indispensable.
Le sang des automobilistes ne contient jamais plus de 0,5g d’alcool
par litre, et l’entretien de leur véhicule est toujours parfait,
y compris le réglage de l’éclairage et de l’échappement.
Le contrôle technique des véhicules est donc une simple formalité.
Les automobilistes n’utilisent leur avertisseur qu’en cas de « danger
immédiat » et jamais pour se plaindre d’un livreur bloquant
la rue à cause d’une voiture garée sur l’emplacement destiné
aux livraisons, encore moins pour appeler quelqu’un.
Doublant un cycliste, ils respectent la distance minimale d’un mètre
que le Code de la Route (et la sécurité) imposent. Abordant
un carrefour, ils ne s’y engagent que s’ils sont certains de pouvoir le
dégager. Lorsque le feu passe à l’orange, ils ralentissent
et s’arrêtent, si bien qu’aucune voiture ne franchit jamais un feu
rouge. Aux passages piétons, ainsi qu’aux feux oranges clignotants,
ils laissent toujours la priorité aux piétons.
Cette conduite conforme aux lois et aux règlements, assortie
d’une exceptionnelle courtoisie, fait de la rue, en plus d’un régal
pour le citoyen respectueux de la légalité, un havre de paix
et de tranquillité pour tous les usagers.
Il en est de même sur la route, où les automobilistes
roulent toujours à moins de 90 km/h, ralentissant à 50 à
la traversée des agglomérations, si bien que la vie est restée
très agréables dans les villages traversés par une
route.
« Bonne nouvelle, les contractuelles sont en grève »
Arrêtons là cette énumération, qui pourrait
encore être longue, et redevenons sérieux.
Pourquoi les nombreuses et dangereuses infractions commises chaque
jour par les automobilistes ne s’impriment-elles pas dans la mémoire
collective ? Comment expliquer la force de l’image de la « personne
âgée renversée par un cycliste », dont l’existence
statistique est presque nulle, et pourquoi les piétons de tous âges
effectivement tués ou blessés par des automobilistes semblent-ils
avoir aussi peu de poids ?
L’acceptation sociale des infractions commises par les automobilistes
est telle qu’on voit régulièrement certains journalistes
annonçant d’un air complice « une bonne nouvelle, les contractuelles
sont en grève ».
Quel contraste entre l’agressivité que provoquent les infractions
commises par des individus fragiles perchés sur un cadre léger
muni de deux roues, et l’indulgence envers d’autres, assis dans une carapace
lourde et rapide, dont les infractions ont pourtant des conséquences
bien plus lourdes !
(l'article original se poursuit avec 4 chapitres:
-
les règles reflètent l'état de l'opinion ou du
rapport de force - actuellement une logique purement automobile
-
Au lieu d'aider le cycliste, on le punit
-
Les responsables disposent d'une grande souplesse pour mieux adapter
les villes aux cyclistes: sens interdits "sauf cyclistes", circulation
autorisée dans les couloirs bus...
-
Sauf exception, les cyclistes sont prudents "par constitution" )
Lorsque les règles auront été écrites au service
des usagers les plus faibles et non plus seulement des plus forts, elles
seront davantage respectables, et respectées. Mais malgré
quelques annonces, la réforme du code de la route dans un sens plus
favorable aux cyclistes n'est pas pour bientôt.
